Courrier à l’enquête Virage (INED), le 2 janvier 2017 + réponse, le 12 janvier 2017

20 juin 2025   //

Notre courrier

Equipe VIRAGE

INED

Bron, le 2 janvier 2017

Objet : questions sur l’enquête VIRAGE

Madame, Monsieur,

Nous nous permettons de vous solliciter à propos de l’article « Viols et agressions sexuelles en France : premiers résultats de l’enquête Virage » publié dans la revue Population & Sociétés (numéro 536, novembre 2016).

En tant qu’association de lutte contre toutes les formes de discriminations fondées sur le genre, nous sommes sensibles à l’équité de traitement entre les sexes. L’étude a attiré notre attention sur plusieurs points. En effet, nous nous interrogeons sur l’approche méthodologique utilisée ainsi que sur certains éléments de langage utilisés dans la publication.

Après un bref rappel contextuel de l’étude VIRAGE, la méthodologie est présentée. Trois questions sont indiquées (page 1, colonne de droite). Les questions 2 et 3 sont posées aux deux sexes. Néanmoins, il existe deux questions 1 : une pour les femmes, une pour les hommes (page 1, colonne de droite, lignes 9-14) :

 Question 1, pour les femmes : « Quelqu’un a-t-il, contre votre gré, touché vos seins ou vos fesses, vous a coincé pour vous embrasser, s’est frotté ou collé contre vous ? »

Question 1, pour les hommes : « Quelqu’un s’est-il, contre votre gré, frotté ou collé contre vous ? » 

Nos questions sont les suivantes :

Qu’est-ce qui motive cette stratégie de deux questions 1, une pour les femmes, une pour les hommes ?

– La question telle que posée aux hommes, en tant que question fermée (exemples limités à « frotté » ou « collé »), n’est-elle pas de nature à orienter la réponse des hommes interrogés ?

– Pourquoi avoir fait le choix de considérer qu’il n’est pas possible de toucher les fesses d’un homme, ses seins contre son gré ?

– Pourquoi avoir fait le choix de considérer qu’un homme ne peut pas être coincé pour être embrassé ?

– Quelle est la conséquence de ces biais sur les résultats de l’enquête ?

Dans l’encadré 1 (page 2, colonne de gauche), la méthodologie est détaillée. Il est précisé que 15 556 femmes et 11 712 hommes ont été interrogés. Notre question est la suivante :

– Comment s’explique un tel écart entre le nombre d’hommes et le nombre de femmes interrogés ?

Dans l’attente de vous lire, nous vous prions d’agréer, Madame, Monsieur, nos meilleurs sentiments.

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La réponse de Virage

Notre commentaire

 

Réponse très intéressante. Notre correspondante nous indique :

1) que certains hommes choisissent de tourner en dérision les questions qui leur sont posées sur d’éventuelles agressions sexuelles subies par eux, et donc n’y répondent pas.

2) que davantage d’hommes que de femmes refusent de répondre aux enquêtes de sciences sociales.

Ceci confirme une donnée que nous connaissons depuis longtemps : les hommes ont tendance à dissimuler leurs pathologies, leurs souffrances, les mauvais traitements qu’ils subissent. Cette tendance est contre-productive, en particulier dans ce contexte, car elle occulte une partie de leur vécu. Le travail du GES, qui les exhorte à témoigner, en est d’autant plus légitimé.

D’autre part, la connaissance de cette tendance doit conduire à une grande prudence vis-à-vis du résultat des diverses enquêtes. Malgré les corrections apportées par les enquêteurs, le nombre d’hommes victimes est sans doute plus important que celui rapporté par les résultats.